jeudi 21 novembre 2024
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L’usure d’un monde de François-Henri Dérésable

En 2022, François-Henri Dérésable décide de partir en Iran sur les traces de l’écrivain voyageur Nicolas Bouvier. Il en publiera un récit de voyage éclairant et passionnant. Éditions Gallimard.

De l’usage du monde à L’usure d’un monde il n’y a qu’un pas, celui franchi par François-Henri Désérable. À 25 ans, les mots de Nicolas Bouvier provoquent chez lui une onde de choc. Il y a dans le récit de l’écrivain voyageur suisse, dans cet appel du large, une promesse de liberté enivrante. Et l’écrivain de se jurer alors qu’un jour ses pas honoreront le chemin fait par Bouvier, afin de prendre « la vraie mesure du monde, en même temps que son pouls. »

Hiver 2022. De Bouvier à Désérable le monde a changé, abîmé par la folie des hommes. Il faut être au choix, fou, inconscient ou protégé des dieux pour décider de partir en Iran au moment même où la révolte gagne les quatre coins du pays après la mort de Masha Amini. Peut-être les heures passées sur la glace ont-elles forgé le caractère guerrier de l’écrivain, habilement dissimulé derrière la douceur de son regard bleu céruléen. Quinze ans après la lecture de Bouvier, il n’a rien perdu de sa détermination, décidant contre vents et marées des autorités françaises, de refaire le chemin iranien. En quarante jours, nombre ô combien symbolique à bien des égards, il parcourt une bonne partie de l’Iran, de Téhéran aux confins du Baloutchistan, en passant par Qom, Kashan, Ispahan, Chiraz, Yazd, Kerman s’immergeant au plus près du peuple iranien dans ce qu’il a à dire et à transmettre au monde. De ces témoignages divers, de ces rencontres marquantes, de cette révolte qui gronde, du courage qui ne faiblit pas et de ces trois mots qui résonnent comme un mantra « Femme, Vie, Liberté », le récit honore le courage des Iraniens bravant la peur et l’interdit. Désérable écoute, observe, se fait le parolier de ce qui se joue profondément au cœur de ces vies et de leurs frémissements.

Au-delà de l’aspect documentaire et politique du livre, c’est un récit profondément sensible et humain que nous offre ici l’écrivain, passionnant, drôle aussi à bien des égards, avec une véritable propension à l’autodérision. Par sa plume éclairée et son regard aiguisé, l’auteur nous permet de donner corps à l’épaisseur de l’ombre, à ce miroir tendu promené tout au long du chemin visité, il confère aux mots le pouvoir de transformer l’usure en patine.

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