Née en Chine d’un père français et d’une mère autrichienne, vous êtes d’emblée multiculturelle, mais vous avez cultivé ce goût pour l’international. Pourquoi ?
J’adore le contact avec les autres. Quand on se comprend mieux, on travaille mieux ensemble. Dans le contexte politique actuel, les gens ont peur. Les élections européennes arrivent et j’espère qu’on va aller dans le sens de l’Europe. Je suis européenne de naissance et de cœur. La diversité des cultures et des personnes constitue aussi la richesse des entreprises. C’est pour cette raison qu’il est important d’avoir des salariés hommes, femmes et de différentes générations dans une entreprise. J’aime bien jongler avec ça, c’est enthousiasmant et challengeant.
Comment avez-vous posé vos valises ici en Alsace ?
J’ai rencontré quelqu’un avec qui j’ai fait un bout de chemin et deux enfants, et je suis restée là depuis 1998. C’est une région transfrontalière riche d’échanges. Et comme je me suis lancée à mon compte en 2007, j’ai des missions diverses et je continue à voyager, car j’accompagne mes clients à l’étranger. J’étais récemment au Vietnam, en octobre je vais en Australie et j’aide bientôt une entreprise sur le marché américain. Il n’y a pas de routine, c’est ce que j’aime. Et je donne aussi des cours dans des parcours de formation continue ou diplômante, toujours dans les thèmes liés à l’international.
Comment avez-vous adhéré à FCE et pourquoi avez-vous accepté d’en prendre la présidence en janvier dernier ?
J’ai connu le réseau en 2017 et j’ai adoré l’ambiance. J’ai beaucoup apprécié le côté partage et la possibilité de ne pas être jugée tout en étant soutenue. Tous les métiers sont représentés donc c’est pratique pour obtenir des informations rapidement. J’ai été trésorière pendant deux ans, puis l’ancienne présidente qui avait terminé ses deux mandats m’a demandé si je voulais prendre la relève.
J’ai un peu sondé les autres membres et j’ai accepté. Je redonne à mon tour ce qu’on m’a donné à une époque. Je crois que surtout depuis le Covid, les gens ont besoin de se retrouver dans des cercles ouverts et bienveillants pour pouvoir échanger. Quel est l’objectif de l’association FCE ?
L’objectif de l’association est de mieux faire entendre la voix des femmes dans le monde de l’entrepreneuriat et de l’économie. En tant que femmes, nous ne voyons pas seulement l’aspect économique et financier, mais aussi l’angle social et humain. Aujourd’hui, les jeunes demandent du sens à leur emploi. Les salariés, surtout depuis le Covid, ne voient pas le travail de la même façon. Ils ne demandent pas seulement un salaire, certains parlent de télétravail, de la semaine de quatre jours. Il faut en tenir compte, l’entreprise doit évoluer et ne pas rester sur les acquis du passé.
Est-ce que FCE est une association féministe ?
Non l’association n’est pas féministe, elle souhaite juste permettre à plus de femmes de s’exprimer. Beaucoup d’entreprises ont encore une direction très masculine, donc dominée par une certaine vision de l’économie. Avec plus de femmes, les entreprises auraient une vision plus large. Selon une étude de la Banque de France, les entreprises qui intègrent des femmes dans leur gouvernance sont plus performantes que les entreprises « traditionnelles ». C’est notre cheval de bataille : que les femmes soient plus nombreuses et plus écoutées dans le monde économique.
D’où vient la sous-représentation des femmes dans les directions d’entreprises ?
De notre culture probablement. On a longtemps assigné les femmes à l’éducation des enfants.
Même si en Europe, on a bien avancé sur ce sujet. Nous nous mettons aussi des freins nous-mêmes. Les femmes ont plus que les hommes le syndrome de l’imposteur. Dans nos réunions FCE, nous travaillons là-dessus, sur comment améliorer notre pitch, notre façon de parler pour nous affirmer davantage et prendre notre place. Nous intervenons aussi aux côtés de l’association 100 000 entrepreneurs pour prôner la mixité dans le monde professionnel. Jusqu’au bac, les filles sont meilleures que les garçons, pourtant elles s’inscrivent moins dans les écoles d’ingénieurs. Grâce à FCE, on montre aux jeunes filles qu’on peut être à la fois cheffe d’entreprise, mère de deux enfants et gérer des voyages à l’autre bout du monde.
Quels sont vos projets pour FCE Colmar ?
J’ai deux thématiques prioritaires pour mon mandat : l’ouverture à l’international et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Nous avons déjà organisé une réunion avec l’Euro District et la CCI de Fribourg sur les problématiques transfrontalières : permis de travail, transport routier, détachement des salariés… Nous aimerions faire de même avec la Suisse. Le 18 mars, nous avons programmé une rencontre sur le thème de la RSE à l’Adira, car cela touche tout le monde, même les petites structures. J’aimerais aussi œuvrer à plus de partage et de dynamique entre les trois délégations alsaciennes : Strasbourg, Colmar et Mulhouse. Sans oublier de développer le réseau. Plus nous aurons d’adhérentes, plus nous serons visibles. Comme l’indique notre slogan : « Seules nous sommes invisibles, ensemble, nous sommes invincibles » !