Le 6 juin 2012, à Lyon, un banal trajet à vélo tourne au cauchemar. Une moto surgit, la roue se cabre, le choc est brutal, irréversible. Paul Gasnier, 20 ans, perd sa mère ce jour-là. Treize ans plus tard, devenu journaliste, il revient sur cet accident dans un livre bouleversant : La collision. Mais plutôt que de livrer un simple témoignage, il choisit d’enquêter, d’interroger les failles d’une société qui fabrique de tels drames.
Paul Gasnier se replonge dans les dossiers judiciaires, relit dépositions et expertises, retrouve policiers, magistrats, témoins. Puis il rencontre la sœur du chauffard. À travers elle, il découvre l’autre versant du drame : une famille immigrée, les difficultés accumulées, l’errance sociale. Peu à peu, le portrait du coupable s’humanise. L’ennemi devient un homme faillible, blessé, à la dérive. En reconstituant les faits, l’auteur élargit son regard. La collision n’oppose pas seulement une victime et un coupable : elle met face à face deux mondes. D’un côté, une femme, sa mère, issue d’un milieu bourgeois et croyant. De l’autre, un adolescent lancé dans la spirale de la délinquance, des trafics, des rodéos urbains. Deux trajectoires que tout oppose, mais que le hasard réunit en une seconde fatale.
La force du livre est là : dépasser l’intime pour raconter le collectif. Paul Gasnier montre comment ces tragédies sont récupérées, notamment par les extrêmes, qui transforment chaque accident en slogan. Lui-même a ressenti cette tentation, cette colère, mais il choisit une autre voie. L’écriture devient résistance : un moyen de redonner toute sa complexité au réel. Du tumulte de la rage jusqu’à l’éveil du pardon, l’auteur décrit un parcours douloureux mais salutaire. Écrit avec une grande justesse, il s’achève sur des pages d’une sobriété bouleversante.
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