A l’école, maître Jacques dessinait déjà ses élèves. C’est d’ailleurs comme ça que tout a commencé, quand il a publié ses créations sur les premiers blogs des années 2000, et qu’il est passé de « trois connexions à 3000. On m’a dit, il faudrait que ce soit un album ».
Il signe alors Jack, « quatre lettres comme Koch, et mes sœurs m’appelaient déjà comme ça », pour le premier tome de Danger, école, publié par Pierre Marchant au Verger éditeur. Suivent trois autres tomes au succès national, « parce que j’ai montré aux enseignants leur vraie vie ». Mais avec « deux boulots à la fois les deux dernières années d’enseignement, j’ai cru devenir fou ! Ça commençait à ressembler à un revenu, avant c’était de l’argent de poche… » sourit en coin l’illustrateur, jamais totalement serein quant à ses finances.
En 2014, il plonge—sans regret—dans le grand bain de l’encre, et, une nouvelle fois grâce aux réseaux, publie une série de dessins accompagnés de textes à lui, L’amour, c’est… « J’étais sur des salons où j’ai rencontré des auteurs, je leur ai demandé s’ils voulaient m’écrire un texte. J’en ai publié 10, 15, 20… Et quatre éditeurs parisiens m’ont démarché, c’est le monde à l’envers ! Parce que d’habitude, tu vas pleurer chez eux avec ta maquette et moi j’ai pu choisir ! » L’amour, c’est… et L’enfance, c’est… paraissent au Livre de poche en 2018 et 2020, tandis que La Terre, c’est… sort aux éditions du Fleuve (2022), en attendant la parution de Le livre, c’est… en mars 2024 à l’occasion de Strasbourg capitale mondiale du livre. « On attend encore des grands noms, mais il y a déjà la ministre de la culture, la maire de Strasbourg, et tous les métiers du livre : imprimeur, éditeur, journalistes, bloggeurs, bookstagrameurs, illustrateurs, etc. J’en suis au 32e dessin sur 120, j’ai encore du boulot ! »
Bretzel, cathédrale, cigogne… et des confessions
Alors, L’Alsace c’est… qui sort le 27 octobre, constitue « plutôt un hors-série qui intéressera un public local », et Le Verger, basé à Strasbourg, l’a donc édité. Entre lieux communs, bretzel, cathédrale et cigogne, la centaine d’auteurs choisis par Jack s’est aussi laissée aller à des confessions : « Des choses vraiment fortes m’ont surpris, comme cette journaliste ukrainienne qui bosse au Conseil de l’Europe et me dit « L’Alsace, j’y suis à l’abri », waouh ! Ou un ami architecte, qui à l’âge de 6 ans est arrivé du Cameroun en plein hiver sans chaussettes : son premier souvenir, c’est le froid… Pour Marie, ma compagne qui enseigne à Paris, c’est la gare de l’Est, une porte d’entrée, ou de sortie ! » Un viticulteur, un brasseur, un comptable, des gens de la religion sur une idée de Pierre Marchant, un restaurateur, des musiciens, des journalistes, des écrivains, le livre brasse large.
Et pour maître Jack, l’Alsace c’est quoi ? « C’est écrit dedans ! rigole-t-il. J’avais envie de dire des trucs aussi, c’est d’ailleurs très perso. J’ai mis par exemple “Attendre sur le bus” : ma compagne m’apprend à parler en français correctement, elle corrige la traduction littérale alsacienne… Ou Joël Tanter, un joueur du Racing, j’ai vu tous les matches de 1977 à 1979-80, quand ils sont devenus champions de France. Pour le Racing, c’est important et pour moi aussi. On ne comprend pas forcément tout… » Mais s’il devait en garder un seul, ce serait « salade mixte. Parce que j’adore ça, je la mange au resto, et il faut que le fromage soit très bon. Et puis le côté mixte, l’Alsace quoi ! »
Dis-moi comment tu dessines
Le dessin d’actualité de Jack Koch est à la Une de Maxi Flash toutes les semaines, mais l’ancien instituteur est aussi chanteur et guitariste dans le groupe de rock Cold Beer et il a toujours un pied à l’école. Pendant ses ateliers pour les enfants, il les incite à « bosser à ma manière, avec mon matériel, mes stylos, mon papier… » Pour L’Alsace, c’est…, il a utilisé des techniques « extrêmement artisanales, avec très peu de retouches informatiques. J’ai par exemple découpé du papier, là c’est une vraie tige de pomme, des grains de cumin collés, c’est du bricolage ! » Du papier kraft, cadeau ou à musique, des tâches de confiture, une carte du club vosgien, etc. Il explique : « L’avantage du travail artisanal, ce sont les originaux, en informatique, il n’y en a pas. Même si je refais le dessin, il sera différent. » Jack aime prendre « le contre-pied des écrans », même s’il relativise : « Les réseaux, c’est mon magasin, et cela me permet aussi de vendre des originaux. J’ai 71 000 personnes qui me suivent sur Facebook, s’ils achetaient tous un livre ce serait formidable ! »