vendredi 6 décembre 2024
AccueilCHRONIQUESLes regards de SimoneL’anglais ? C’est de l’alsacien ! La preuve par Paul Adolf

L’anglais ? C’est de l’alsacien ! La preuve par Paul Adolf

Englisch ? Dìs ìsch elsassisch ! Paul Adolf est un précurseur, un passionné de la première heure pour montrer les parentés entre l’anglais et l’alsacien. Les contacts des Alsaciens avec les milieux anglophones, en Alsace et dans le monde, l’ont vite convaincu de l’utilité et de la nécessité d’un dictionnaire comparatif alsacien-anglais. L’anglais par l’alsacien, publié en 1996, fut un succès international d’édition.

Cet ancien professeur d’anglais, né à Strasbourg, qui vit depuis l’âge de 6 ans à Obernai, est diplômé d’études supérieures, Docteur ès lettres et fervent adepte du plurilinguisme en Alsace. Il a créé à Obernai, dès 1966, la première université populaire des villes moyennes du Bas-Rhin, à l’intention des adultes, mais aussi des jeunes désireux de parfaire leurs connaissances. Il y a dispensé les premiers cours d’anglais en tirant parti des ressources dialectales. Il a aussi donné des cours originaux d’alsacien pour contribuer à la sauvegarde du patrimoine linguistique alsacien, si important dans l’apprentissage de l’anglais et de l’allemand.

Extrait du dictionnaire L’anglais par l’alsacien. / ©dr

En rédigeant son dictionnaire de plus de 1000 pages, il pensait aux Alsaciens d’Alsace, mais aussi à ceux qui sont souvent loin de leur langue natale, et qui sont soucieux de ne pas perdre leurs racines ancestrales et linguistiques. Rompu aux méthodes de la linguistique contrastive et tirant parti de ses connaissances dialectales (mots, expressions, proverbes, etc.) et de ses enquêtes dialectologiques, il avait déjà consacré deux thèses à une comparaison de l’alsacien et de l’anglais qui ont abouti, après des années de recherche, à cette entreprise lexicographique de longue haleine qui est un inventaire de la plupart des étymologies et des richesses lexicales communes aux parlers alsaciens et à l’anglais.

J’ai rencontré Paul Adolf en 1999 lors de la préparation de mon voyage en Californie pour la rédaction du livre Un été en Californie, au cœur du rêve américain avec les Alsaciens du Nouveau-Monde (La Nuée Bleue).

« L’anglais ? Mais c’est de l’alsacien », m’a-t-il alors dit avec fougue ajoutant qu’il avait appris le vieil anglais en 1956 et que ce n’est pas si difficile pour un Alsacien.

Car le vieil anglais, de par sa grammaire et son lexique notamment, est encore plus étroitement lié à la langue alsacienne que l’anglais standard actuel. La langue anglo-saxonne, donc le vieil anglais, ajoute Paul Adolf, est descendue des parlers du bas-allemand, du « Niederdeutsch » nommé « Low Dutch » en anglais. D’une part, elle fut introduite en Angleterre par les Angles, une tribu germanique dont le nom est issu du mot allemand « eng », étroit, tordu, du fait de la forme du Schleswig-Holstein et du Jutland (qui correspondent à l’actuel Danemark continental). Les Angles et les Jutes sont partis de là au Ve siècle après Jésus-Christ et sont allés en Angleterre qui était à ce moment-là occupée par les Celtes, après le départ des Romains. À ces tribus, il faut ajouter les Saxons de l’Allemagne du Nord et les Frisons, peut-être même des Francs. C’était à la même époque que les Alamans sont venus s’installer en Alsace. La langue anglo-saxonne était au départ composée presque exclusivement de mots germaniques du « Low German », donc du bas-allemand, dont bon nombre sont apparentés à la langue alsacienne

Dictionnaire l’Anglais par l’Alsacien : un succès
international, Ed. Le Verger, 1996. / ©dr

Le savoir de Paul Adolf s’est exporté outre-Atlantique : un éditeur new-yorkais, Palgrave Macmillan, a publié en 2007 Learning Alsatian through English, une méthode pour apprendre l’alsacien par l’anglais. Encore dynamique pour ses 93 ans, Paul Adolf est une figure aimée d’Obernai où il a notamment créé le cercle d’échecs en 1969 et où il s’est également consacré à des visites guidées plurilingues au service de l’Office du tourisme local.

En 2005, il fut invité à New York, puis à Castroville, qui a sa « rue d’Obernai ». Avec sa femme adorée, Malou, décédée en 2018, ils ont planté aux côtés de Christiane Wood, une Obernoise de Castroville, un arbre symbolisant Obernai dans le Jardin des Racines, réalisé aux formes de l’Alsace, dans cette enclave dialectophone texane située à 9000 kilomètres de l’Alsace.

Dictionnaire comparatif multilingue Français-
Allemand-Alsacien-Anglais, Ed. Midgard, 2006. / ©dr

« Faire barrage à la barrière des langues et cela grâce à notre volonté » est le leitmotiv de Paul Adolf. Et il ajoute ce dicton :

« Là où volonté il y a, une voie elle ouvrira ».
En anglais : « Where there’s a will, there’s a way »
Et en alsacien : « Wo e Wìlle ìsch, ìsch e Waj ».

Learning Alsatian through English, Ed. Palgrave Macmillan (New York), 2007. / ©dr

Bibliographie

  • Dictionnaire l’Anglais par l’Alsacien (comparatif et bilingue)
    Le Verger, 1996 en collaboration avec Raymond Matzen
  • Proverbes alsaciens et équivalents anglais français (A.Churlet – R. Matzen – P. Adolf) Ed. Le Verger, 2011.
  • Mer lehre Englisch (Guide pratique de conversation-grammaire Anglaise pour Alsaciens). Ed. Bentzinger Jérôme, 2002.
  • Dictionnaire comparatif multilingue Français-Allemand-Alsacien-Anglais, Ed. Midgard, 2006
  • Learning Alsatian through English, Palgrave Macmillan (New York), 2007.
  • Guide pratique de conversation touristique en Alsacien-Allemand-Français-Anglais   Bentzinger Jérôme

L’anglais et l’alsacien : si proches

  •  an arm : e Àrm (un bras)
  • a bed : e Bett (un lit)
  • better : besser (meilleur)
  • an elbow : e Elleböje (un coude)
  • an end : e End (une fin)
  • a friend : e Frìnd (un ami)
  • fresh : frisch (frais)
  • a girdle : e Gìrdel (une ceinture)
  • God : Gott (Dieu)
  • gold : gold (or)
  • a goldfinch : e Goldfìnk (un chardonneret)
  • grass : Gràs (herbe)
  • a hand : e Hànd (une main)
  • to hang : hanke (pendre)
  • a man : e Mànn (un homme)
  • a mare : e Marre (une jument)
  • Monday : Mondaa (lundi)
  • rancid : rànzig (rance)
  • to ride : ridde (chevaucher)
  • to rumble : rùmmle (tonner)
  • a shingle : e Schìndel (un bardeau)
  • Sunday : Sonndaa (dimanche)
  • a shoe :  e Schüe (un soulier)
  • shrill : schrìll (perçant)
  • a sickle : e Sìchel (une faucillle)
  • a strike : e Streik (une grève)
ARTICLES SIMILAIRES
- Publicité -

LES PLUS POPULAIRES