Au démarrage, Adrien Bertrand, un affineur de Lapoutroie, initie l’exercice. Deux générations après, c’est Gilbert Dodin, marié à Thérèse Krebs, petite fille d’Adrien Bertrand, qui officialise la marque commerciale éponyme et lui donne une assise nouvelle. Fini les variations qualitatives des blancs d’un petit producteur à un autre : Gilbert fait le choix de sécuriser sa matière première en tournant son approvisionnement vers la coopérative laitière d’Herbéviller.
Fort d’une production homogène, Gilbert multiplie les tournées de livraison entre épiceries, grossistes et cafés-restaurants. La Maison se fait un nom, jusqu’en Lorraine, avant que sa fille Brigitte Dodin-Baldinger ne prenne à son tour les rênes de l’entreprise, avec son époux Éric, en charge de la production et des caves d’affinage. 20 salariés et quelques années plus tard, c’est leur fille Maritie qui, en 2022, rejoint l’aventure familiale.
Médaille d’argent au Concours général Agricole de Paris
Croire que la success-story de la Maison Dodin ne reposerait que sur le génie commercial serait néanmoins commettre une grave erreur tant sa singularité en serait occultée. Sa force : continuer à produire depuis 1908 un munster « à l’Ancienne », entièrement affiné à la main, sur des planches en bois de sapin des Vosges, lavé avec une eau pure, frotté tous les deux à trois jours, puis retourné sur l’autre face durant les vingt et un jours nécessaires à l’obtention d’une précieuse Appellation d’Origine Protégée reconnue au sein de l’ensemble de l’Union Européenne. Les clients ne tarissent d’ailleurs pas d’éloges : « Goût franc et inimitable », « richesse florale », « belle robe de couleur jaune orangé » sont autant de qualificatifs associés à la production familiale.
La grande distribution, elle-même, ne s’y est pas trompée, de nombreuses enseignes lui reconnaissant un savoir-faire local inestimable. De même le monde paysan qui, cette année, lui a décerné la médaille d’argent au Concours général Agricole de Paris pour son petit Munster au Cumin. De quoi rendre un peu plus fiers encore Adrien et ses héritiers, plus de cent ans après des débuts initiés dans une cave d’affinage de Lapoutroie qui n’en finit plus de repousser les murs de son excellence.
Christophe Nonnenmacher
