mardi 22 avril 2025
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Ange Loing – Gardien de l’agriculture alsacienne

Au départ, il s’est plutôt tourné vers le commerce. Mais il a finalement repris l’exploitation familiale Des Schallandos, et l’a transformée. Ange Loing ne s’est pas arrêté là, et s’est aussi investi dans le syndicalisme. Il est depuis le début de l’année le nouveau président de la Chambre d’agriculture d’Alsace. L’apogée de la carrière d’un homme engagé qui continue de penser à l’avenir de son métier.

À l’origine, l’agriculture, ce n’était pas une évidence pour vous ?

Non, pas du tout. J’étais d’ailleurs loin de ça, j’ai travaillé dans un métier complètement différent. J’étais commercial dans le matériel de construction. J’ai une formation dans la gestion forestière et j’avais un boulot dans le commerce du bois, pendant plusieurs années, mais quand la question de l’avenir de la ferme s’est posée, on a réfléchi à un projet, pour que ça perdure. L’exploitation, c’est une histoire familiale. Le lieu-dit s’appelle Les Schallandos, c’est l’origine du nom de la ferme. On est là depuis 1970, mon grand-père a construit le premier bâtiment. Je l’ai finalement reprise à mon père en 2014. Rapidement, j’ai été rejoint par Coralie, mon épouse, qui s’est installée avec moi en 2021. C’était une ferme principalement laitière, on ne faisait que du lait. Alors quand je suis arrivé, j’avais cette volonté de transformer le lait et d’aller chercher le consommateur, de proposer le produit jusqu’à lui. Je trouvais dommage de me donner du mal à en faire et après, de le vendre à quelqu’un sans savoir ce qu’il devenait, où il allait. Donc on a créé une fromagerie en 2014, et on a commencé à faire des produits laitiers vers 2015. Mais au départ, derrière tout ça, il y a quand même 45 vaches laitières, une centaine d’animaux en tout. On est une ferme avec des produits certifiés Agriculture Biologique depuis 1998.

Et maintenant, vous vendez des yaourts, du fromage, des glaces, et même des cosmétiques. Une grosse évolution en peu de temps.

En effet. Déjà, nous avons une trentaine de produits laitiers différents, du lait pasteurisé en bouteille aux yaourts nature, en passant par les crèmes desserts. Il y a aussi des fromages, oui. Pour ne pas rester dans le classique du secteur, on n’a pas voulu faire de munster, on trouvait ça plus drôle de faire autre chose. On propose un carré d’Hachimette : un genre de camembert, à pâte molle et croûte fleurie. C’est carré, et nous sommes à Hachimette, donc on n’a pas cherché très loin (rires). On fabrique aussi un bleu des Vosges, c’est une exclusivité. Sans oublier la tomme de montagne. Et vous l’avez dit, en plus de tout ça, on a aussi une gamme de glaces. Tout est pratiquement toujours vendu en direct aux consommateurs, principalement via des magasins de producteurs dans la vallée, à Mulhouse, Colmar et Sélestat. Cela représente près de 70% de mes ventes. L’activité cosmétique, elle, a été créée en 2019 – 2020. On fabrique des savons avec une partie du lait et du lactosérum. Il y a une quinzaine de savons et de shampoings solides, une gamme de crèmes et du lait corporel. En tout, il y a environ 25 produits. La marque qui les commercialise, c’est la Ferme à Bulles.

Des produits cosmétiques fabriqués à partir du lait des vaches d’Ange Loing. / ©Dr
En plus de l’exploitation, vous avez eu un engagement syndical important. Pourquoi ?

Quand je suis revenu dans le monde agricole en 2014, je me suis engagé auprès des Jeunes Agriculteurs. J’étais vice-président de la structure au niveau national. J’avais envie de comprendre comment marche le monde agricole et je trouvais important de le défendre. Il y a beaucoup de sujets graves qu’il faut pousser, développer, faire avancer. J’ai été pendant 4 ans membre du bureau national. Ensuite, j’ai été président des Jeunes Agriculteurs du Haut-Rhin, puis membre de la Chambre d’agriculture.

Début mars, j’en ai pris la présidence. C’est une suite logique de mon investissement. Si on veut faire avancer les dossiers, il faut des gens engagés. Donc je m’engage. Il n’y a pas le choix. Je voulais apporter ma pierre à l’édifice.

« On est une ferme avec des produits certifiés Agriculture Biologique depuis 1998 »

Le secteur est en crise. Quels dossiers souhaitez-vous faire avancer durant votre mandat ?

Tous les dossiers sont importants, comme l’eau, le conseil aux agriculteurs. Mais c’est sûr que certains seront mis en avant. Celui qui me tient le plus à cœur, c’est l’installation dans le monde agricole. D’ici 10 ans, environ la moitié des chefs d’exploitation vont prendre leur retraite. Les deux tiers ont plus de 50 ans. La pyramide des âges est assez inquiétante. Donc il nous faut des bras et des cerveaux pour renouveler, rajeunir. La logique à l’œuvre depuis un moment, à savoir le fils reprend l’affaire, ne fonctionne plus. Il y a besoin de plus que ça. Aujourd’hui, pour trois départs en retraite, il y a une installation. Donc on perd beaucoup de fermes. Heureusement, on a des solutions, mais il faut d’abord identifier les freins. L’un d’entre eux, c’est l’accès au foncier. Parmi les solutions, il y a par exemple des répertoires à l’installation : si un agriculteur veut partir à la retraite, il est censé s’inscrire, et si une personne cherche une ferme, elle peut en trouver sur ce répertoire. Cela fait partie des pistes à améliorer. Bien sûr, nous devons en trouver d’autres. Il y a aussi la question de la fiscalité : comment transmettre ce qui est déjà cher ? Parfois, on a l’impression de payer deux fois. Il faut également travailler sur la formation.

Que dire aux jeunes alors, pour les pousser à prendre la relève ?

Que ce métier est superbe, parce que nous sommes attachés au territoire. Et on arrive à en tirer le meilleur. En partant de l’herbe qu’il y a ici, on finit par proposer des consommables aux citoyens. C’est une grande satisfaction. C’est aussi une fierté d’avoir réussi à créer des équipes et des magasins dans ce territoire. Il faut dire aux jeunes que se lancer, c’est faisable.

L’info en plus

La Ferme Des Schallandos produit de l’énergie grâce à des panneaux solaires et une centrale hydro-électrique. Elle est également autonome en chauffage grâce au bois de ses prés.

 

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