lundi 12 mai 2025

34m2, de Louise Mey

Avec 34 m², Louise Mey enferme son lecteur dans un huis clos oppressant. Un roman court, tendu, où chaque page resserre un peu plus l’étau. Éditions du Masque.

Il faut toujours se méfier un peu des phrases toutes faites qu’on plaque sur les livres, surtout quand elles parlent de texte « coup de poing ». Pourtant, parfois, il n’y a pas d’autre mot. On lit, et on sent physiquement que l’air se fait rare. Ce texte en est la preuve.

Avec 34 m², Louise Mey ne cherche pas à choquer. Elle ne filme pas la scène du drame. Elle choisit un autre angle, beaucoup plus dur à soutenir : celui de l’après. Quand le mal est censé être loin. Quand la justice a fait son travail, que l’homme a disparu du décor, mais que le danger, lui, n’a pas quitté la pièce. Juliette vit seule avec son bébé dans un espace trop étroit pour oublier. Il y a les murs, bien réels, et il y a tout ce qui circule entre eux : la peur, l’hypervigilance, l’instinct de survie. Ce qui reste quand on a fui, mais qu’on continue, malgré soi, de vivre sous tension. C’est là que réside la force du livre : ne pas raconter la fuite, mais tout ce qui vient après. Ce que ça coûte, chaque jour, de tenir debout. De continuer à avancer quand la mémoire reste cadenassée à l’alerte. Quand la menace n’a même plus besoin d’être là pour agir. Alors, Juliette s’invente des gestes, des chiffres, des mots. De petites parades contre l’invisible. Elle surveille, elle anticipe, elle s’épuise à rester forte — parce qu’elle n’a pas vraiment le choix. Et quand l’histoire bascule — car elle bascule, forcément — il est déjà trop tard pour reprendre son souffle.

L’écriture de Louise Mey épouse cette tension. Le tout est d’une précision chirurgicale. Chaque phrase tient, chaque mot vibre, à distance de l’emphase, mais toujours au plus près de la peur. Pas besoin d’effets spectaculaires. Le malaise s’installe sans bruit, avec cette lenteur implacable qui finit par couper le souffle. Louise Mey signe un roman bref, mais redoutable. Un livre qui ne raconte pas la fin de l’emprise, mais son travail souterrain. Et qui, une fois refermé, laisse un sentiment glaçant.

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