mercredi 16 octobre 2024
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De:Ja – Porte-parole d’une cuisine nature

Jeanne Satori et David Degoursy unis dans la vie personnelle et professionnelle, sont deux chefs en cuisine, qui passent en salle et au service dès l’arrivée des clients. De:ja, avec seize couverts, intimiste, presqu’avant-gardiste, peut se targuer d’avoir créé la surprise lors de la cérémonie du guide Michelin à Strasbourg le 6 mars dernier. Le jeune duo, après quatre années de métier seulement, décroche deux distinctions : leur première étoile Michelin et l’étoile verte pour leur cuisine durable.

« Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le poids des années. » (Corneille, Le Cid). Le restaurant se nomme de:ja, car c’est l’exclamation de leur famille quand ils ont annoncé vouloir s’installer. Leur parcours est atypique, leur personnalité culinaire dans l’air du temps. Jeanne Satory est diplômée d’une licence en écologie. Formés tous les deux chez Yannick Germain au Bœuf à Sessenheim, ils sont de grands admirateurs et proches de la philosophie culinaire de René Redzepi, Magnus Nielson, Thierry Schwartz, ou Loïc Villemin.

Une cuisine identitaire et épurée

Ils ont choisi le métier de cuisinier pour travailler la matière vivante, de la terre à l’assiette, et partir à la rencontre des producteurs et des agriculteurs. Les cueillettes, la forêt, le potager font partie des motivations de leur reconversion professionnelle.

« Nous revendiquons une cuisine nature, dans laquelle nous avons foi et souhaitons en être des porte-paroles », mentionnent les deux chefs. « Mais, nous sommes aussi inspirés par la cuisine bourgeoise, classique et française, scandinave ou japonaise. C’est un mix d’influences, créateur d’une cuisine identitaire, personnelle, épurée. Nous avons à cœur d’expliquer notre démarche, c’est la raison pour laquelle nous sommes en service près des convives (et non des clients). Il y a un vrai échange possible, car nous avons seize couverts », précise Jeanne.

Pour les deux jeunes entrepreneurs, c’est l’envie de sublimer les produits issus de la terre nourricière, avec éthique, durabilité et responsabilité́ qui les anime. Jeanne et David placent leurs projecteurs sur les légumes qu’ils mettent à l’honneur. Le plat de l’échalote est déjà signature : elle est rôtie et confite, déposée au centre de l’assiette et badigeonnée d’huile. Le chef y dépose une quenelle de crème glacée noisette, café du Piémont et échalotes. Cette crème glacée relie tous les ingrédients de la recette. Il ajoute une sauce sabayon au vinaigre de miel de la ferme Kalbin à Freland. Le sabayon apporte de la gourmandise, du gras et de l’acidité. Une composition très pure dans l’assiette. « Les techniques de conservation, telle la fermentation, révèlent de nouvelles saveurs pour les mets comme pour les boissons », explique Jeanne. « Le salage à cru, est parfait pour préserver la chair d’un poisson. » Des pratiques qui s’inscrivent pleinement dans leur vision d’une gastronomie éthique, éco-responsable, valorisant les produits dans leur intégralité. Leurs menus « Fenaison » (3 plats/ 58€), « Moisson » (5 plats/ 98€) et « Vendange » (7 plats/128€) sont imaginés comme une expérience à vivre et à partager.

L’échalote, un plat signature.
/ ©sandrine kauffer

« Nous sommes des nourrisseurs »

85 % des partenaires du restaurant de:ja pratiquent une agriculture certifiée biologique ou en biodynamie. « Nous avons rencontré 140 producteurs et nous découvrons un fournisseur par semaine environ », annonce David. « Nous collaborons avec les Jardins d’Altaïr, une exploitation maraîchère en agriculture biologique, qui favorise la réinsertion professionnelle. Partage, solidarité, et naturalité sont des valeurs que nous partageons avec Loïc, un ancien cuisinier devenu maraîcher et Cyrielle, responsable agricole. Ils font pousser des légumes et des fruits savoureux sur un terroir sablonneux à Oberhoffen », complète Jeanne.

L’oignon sublimé.
/ ©sandrine kauffer

Les deux chefs se fournissent également dans les fermes Le pré aux colimaçons pour les escargots, Heckmann pour les asperges, la rhubarbe et les fraises en bio, ou encore celle de Truttenhausen pour les légumes. Les paysans-boulangers Au pain des sables à Hoerdt leur livrent du pain biologique au levain naturel. Dans le cercle vertueux de leur démarche, ils intellectualisent et globalisent l’expérience culinaire, offrant une cuisine nouvelle, dans l’air du temps et répondant aux impératifs climatologiques.

Sandrine Kauffer-Binz

Le 6 mars 2023, ils décrochent l’étoile Michelin et l’étoile verte. David tient le trophée. / ©Sandrine Kauffer
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