mardi 25 février 2025
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Après de Raphaël Meltz

Avec Après, Raphaël Meltz nous offre un texte bouleversant sur l’absence et la résilience. Éditions Le Tripode.

Il y a des livres qui s’infiltrent en nous sans fracas, qui bouleversent sans hausser le ton. Après de Raphaël Meltz appartient à cette lignée rare : celle des textes qui murmurent, mais résonnent longtemps, qui disent l’essentiel sans l’asséner. Lucas, quadragénaire comblé, aime sa femme, ses enfants et ses échappées à vélo. Un matin il enfourche son destrier, fendant l’air tiède du Sud. Il ne sait pas que c’est la dernière fois. Un virage, un frein qui cède, une camionnette… et le monde continue sans lui. Mais pas tout à fait. Car Lucas reste là, suspendu dans cet entre-deux où l’on voit sans être vu, où l’on sent sans pouvoir toucher. C’est depuis cet interstice que se déploie ce roman vertigineux. Un texte qui ne raconte pas la fin, mais ce qu’elle laisse derrière elle. Car l’homme ne disparaît pas d’un coup. Il assiste, impuissant, à l’onde de choc qui se propage. Il est là, spectateur invisible, tandis que les siens vacillent. Sa femme qui réapprend le silence. Ses deux enfants qui cherchent dans l’absence un territoire encore habitable. Une maison qui se vide de sa lumière.

Ce qui frappe dans ce texte, c’est la retenue infinie de son écriture. Pas d’excès larmoyant, pas de grandiloquence, mais une précision chirurgicale dans l’émotion. Le deuil n’est pas ici une tempête furieuse, mais une pluie fine et insistante, qui creuse lentement les cœurs et imprègne les âmes. À travers le regard du disparu, l’auteur explore la douleur de ceux qui restent avec une grâce infinie, une pudeur lumineuse. Raphaël Meltz, après les éclats ironiques de Paresse pour tous, abandonne la légèreté pour nous offrir un texte d’une rare profondeur. Loin du pathos, il écrit l’absence comme une empreinte qui s’efface lentement, une dissolution progressive où l’amour ne disparaît pas, mais se transforme. À cette douleur qu’on croyait figée, on se surprend un jour à respirer plus sereinement. Ce n’est pas l’oubli qui s’impose, mais la vie, tenace, qui poursuit son chemin. Et c’est ainsi, sans violence ni éclat, que la perte se réinvente. Ce texte le dit magnifiquement
et poétiquement.

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